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Elmourzaiev et autres c. Russie

Ajouté par on Wednesday, 2 September 2009.    496 views Aucun commentaire
Elmourzaiev et autres c. Russie

Le cas de la CEDH du Elmourzaiev et autres c. Russie (requête no. 3019/04).

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COUR EUROPÉENNE DES DROITS DE L’HOMME

429

12.6.2008

Communiqué du Greffier

ARRÊT DE CHAMBRE
ELMOURZAÏEV ET AUTRES c. RUSSIE

La Cour européenne des droits de l’homme a communiqué aujourd’hui par écrit son arrêt de chambre dans l’affaire Elmourzaïev et autres c. Russie (requête no 3019/04).

La Cour conclut, à l’unanimité :

· à la violation de l’article 2 (droit à la vie) de la Convention européenne des droits de l’homme en ce qui concerne Apti et Moussa Elmourzaïev ;

· à la violation de l’article 2 de la Convention, à raison du manquement de l’Etat défendeur à mener une enquête effective sur les circonstances dans lesquelles Apti et Moussa Elmourzaïev ont disparu ;

· à la violation de l’article 3 (interdiction des traitements inhumains ou dégradants) en ce qui concerne les requérants ;

· à la violation de l’article 5 (droit à la liberté et à la sûreté) en ce qui concerne Apti et Moussa Elmourzaïev ; et,

· à la violation de l’article 13 (droit à un recours effectif) combiné avec l’article 2.

En application de l’article 41 (satisfaction équitable) de la Convention, et au titre du préjudice moral, la Cour alloue 5 000 euros (EUR) à la deuxième et au troisième requérants conjointement ; 24 000 EUR aux sixième, septième et huitième requérants conjointement ; 24 000 EUR aux neuvième, dixième et onzième requérants conjointement, et 2 000 EUR à chacun des premier, quatrième, cinquième et douzième requérants. La Cour octroie aux requérants 5 150 EUR pour frais et dépens. (L’arrêt n’existe qu’en anglais.)

1.  Principaux faits

Les requérants sont 12 ressortissants russes, Soupian Khassanovitch Elmourzaïev, Zina Elmourzaïeva, Khassan Katayevitch Elmourzaïev, Issa Khassanovitch Elmourzaïev, Aslanbek Khassanovitch Elmourzaïev, Zoura Ismaïlovna Elmourzaïeva, Beslan Moussayevitch Elmourzaïev, Movsar Moussayevitch Elmourzaïev, Larissa Chekhmirzayevna (Chakhmirzayevna) Moukhtarova, Mariam Aptiyevna Elmourzaïeva (Moukhtarova), Magomed Aptiyevitch Elmourzaïev (Moukhtarov), Ayshat Khassanovna Elmourzaïeva, qui sont nés en 1963, 1933, 1933, 1954, 1967, 1964, 1984, 1986, 1978, 1999, 2001 et 1976, respectivement, et résident à Ourous-Martan (Tchétchénie). Ils sont les parents, conjoints, frères/sœurs ou enfants de M. Apti Khassanovitch Elmourzaïev, né en 1969, et de M. Moussa Khassanovitch Elmourzaïev, né en 1956.

A l’occasion d’incidents distincts, en juillet 2002 et en janvier 2003, M. Apti Elmourzaïev et M. Moussa Elmourzaïev furent enlevés chez eux, dans leur village de Martan-Tchou, sous la menace d’une arme à feu, par un groupe d’hommes armés portant l’uniforme. Les enlèvements eurent lieu vers 2 heures du matin et dans aucun des deux cas les hommes armés ne produisirent de mandat ou ne fournirent d’explications. On banda les yeux des deux hommes et on leur lia les mains avec du ruban adhésif. Leurs proches furent sommés de ne pas intervenir et de ne pas suivre le groupe. Lors du premier enlèvement, un coup de feu fut tiré alors que l’un des requérants était sorti de la maison pour voir ce qui se passait. Depuis leur enlèvement, aucun des deux frères n’a été revu.

La famille multiplia les démarches aux fins de localiser les deux hommes, notamment en prenant contact avec les autorités militaires, le parquet, le département local du Service fédéral de sécurité (FSB) et des représentants locaux du ministère de l’Intérieur de la République tchétchène. Des enquêtes pénales furent ouvertes sur les deux enlèvements. Elles furent interrompues à plusieurs reprises et, en dépit de quelques mesures d’investigation, ne permirent pas l’identification des coupables.

En juin 2006, le premier requérant déposa une plainte auprès du tribunal municipal, alléguant que l’enquête avait été excessivement longue et avait été suspendue à tort. Il se plaignait également d’avoir été privé d’accès aux dossiers. Dans son jugement, le tribunal municipal releva des lacunes dans l’enquête, notamment le manquement à identifier et interroger des soldats fédéraux qui avaient été de service au poste de contrôle lors des faits ainsi que les chefs des autorités locales chargées de l’ordre public. Le premier requérant put consulter le dossier concernant Apti Elmourzaïev mais ne fut pas autorisé à en tirer des photocopies. On ne lui donna pas accès au second dossier parce qu’il n’avait pas le statut de victime dans l’affaire. Il fut débouté de son recours auprès de la Cour suprême de la République tchétchène.

2.  Procédure et composition de la Cour

La requête a été introduite devant la Cour européenne des droits de l’homme le 9 janvier 2004.

L’arrêt a été rendu par une chambre de sept juges composée de :

Christos Rozakis (Grec), président,
Anatoly Kovler (Russe),
Elisabeth Steiner (Autrichienne),
Dean Spielmann (Luxembourgeois),
Sverre Erik Jebens (Norvégien),
Giorgio Malinverni (Suisse),
George Nicolaou (Cypriote), juges,

ainsi que de Søren Nielsen, greffier de section.

3.  Résumé de l’arrêt

Griefs

Les requérants se plaignaient que leurs proches avaient disparu après avoir été arrêtés par des soldats russes et que les autorités nationales avaient manqué à mener une enquête effective dans cette affaire. Ils invoquaient les articles 2, 3, 5 et 13 de la Convention.

Décision de la Cour

Appréciation des faits

La Cour constate que les requérants ont établi un commencement de preuve selon lequel leurs proches ont été appréhendés par des soldats fédéraux. Tirant des conclusions du manquement du Gouvernement à soumettre des pièces que lui seul a en sa possession ou à fournir une autre explication plausible quant aux faits en question, la Cour estime qu’Apti et Moussa Elmourzaïev ont été arrêtés chez eux le 9 juillet 2002 et le 27 janvier 2003 respectivement, par des soldats fédéraux, au cours d’opérations de sécurité.

Depuis les dates respectives auxquelles ils ont été enlevés, il n’y a pas eu de nouvelles fiables d’Apti et de Moussa Elmourzaïev. Leurs noms n’ont été trouvés dans aucun registre officiel de détention. Le Gouvernement n’a soumis aucune explication quant à ce qui leur était arrivé à la suite de leur enlèvement.

Dans le contexte du conflit en République tchétchène, lorsqu’une personne est détenue par des soldats non identifiés et qu’il n’y a pas reconnaissance ultérieure de la détention, cette mesure peut être considérée comme une menace pour la vie. L’absence d’Apti et de Moussa Elmourzaïev ou de nouvelles d’eux depuis plusieurs années corroborent ce présupposé.

Apti et Moussa Elmourzaïev doivent donc être présumés morts à la suite de leur détention non reconnue par des soldats fédéraux.

Article 2

Concernant la violation alléguée du droit à la vie d’Apti et de Moussa Elmourzaïev

La Cour a déjà jugé établi que les proches des requérants devaient être présumés décédés à la suite de leur arrestation non reconnue par des soldats fédéraux et que leur décès pouvait être imputé à l’Etat. En l’absence d’une quelconque justification quant au recours à la force meurtrière par des agents de l’Etat, la Cour conclut qu’il y a eu violation de l’article 2 en ce qui concerne Apti et Moussa Elmourzaïev.

Concernant le caractère prétendument inapproprié de l’enquête sur les enlèvements

La Cour relève que l’enquête sur le premier enlèvement a été interrompue et relancée à trois reprises et que le parquet de district a connu de longues périodes d’inactivité pendant lesquelles aucune procédure n’était en cours. Les efforts des enquêteurs ont été encore plus médiocres en ce qui concerne les recherches sur Moussa Elmourzaïev, car entre le 20 septembre 2003 et le 31 juillet 2006, c’est-à-dire pendant deux ans, dix mois et 11 jours, aucune procédure d’aucune sorte n’a été en cours dans cette affaire.

L’effectivité des deux enquêtes a été sapée dès le début par le manquement des autorités à prendre les mesures d’enquête nécessaires et urgentes. Pareils délais sont de nature à compromettre une enquête sur un crime tel qu’un enlèvement commis dans des circonstances menaçant la vie, situation dans laquelle d’importantes mesures doivent être prises dès les premiers jours. Il semble qu’après cela un certain nombre de mesures essentielles aient été retardées, pour être prises finalement – lorsqu’elles l’ont été – après communication de la requête au gouvernement défendeur.

Dans ces conditions, les autorités ont manqué à mener une enquête pénale effective sur les disparitions d’Apti et de Moussa Elmourzaïev, au mépris de l’article 2.

Article 3

La Cour note que les requérants sont des proches des deux disparus. Depuis plus de cinq ans, ils n’ont eu aucune nouvelle d’Apti et de Moussa Elmourzaïev. Durant cet intervalle, ils se sont adressés, par écrit ou personnellement, à divers organes officiels pour avoir des informations sur leurs proches. Malgré leurs demandes, ils n’ont jamais obtenu d’explications ou d’informations plausibles quant à ce qu’il était advenu des frères Elmourzaïev après leur enlèvement. Dans les réponses qu’ils ont reçues, les autorités se contentaient de nier que l’Etat fût responsable des enlèvements ou de les informer qu’une enquête était en cours.

Dès lors, les requérants ont vécu et continuent de vivre dans la détresse et l’angoisse à cause de la disparition de leurs proches et de l’impossibilité où ils se trouvent d’établir ce qui leur est arrivé. La manière dont les autorités ont traité leurs plaintes doit être considérée comme un traitement inhumain contraire à l’article 3.

Article 5

La Cour estime qu’Apti et Moussa Elmourzaïev ont subi une détention non reconnue et ont été privés des garanties contenues à l’article 5 de la Convention ; d’où une violation particulièrement grave du droit à la liberté et à la sûreté consacré par cette disposition.

Article 13

Dans des circonstances où, comme en l’espèce, l’enquête pénale sur la disparition de deux personnes a été ineffective et où l’effectivité de tout autre recours ayant pu exister a donc été sapée, l’Etat a failli à son obligation découlant de l’article 13 de la Convention. Dès lors, il y a eu violation de l’article 13 combiné avec l’article 2.

Aucune question distincte ne se pose sous l’angle de l’article 13 quant aux violations alléguées des articles 3 et 5.

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